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Le cloud : un gros nuage au-dessus de la mémoire de l’humanité ?

Sous couvert d’un accès à un droit fondamental d’accéder à l’énergie (ici le nucléaire civil que d’aucun pense aisément transférable vers un usage militaire), l’Iran a initié le grand public à son corps défendant (quoique ?) à un nouveau modèle de guerre entre Etats-Nations.

Finie la bombinette atomique portable de 20 kilotonnes (environ un millième de la puissance d’Hiroshima) surnommée « Davy Crockett » par les américains. Inutile la bombe génocidaire thermonucléaire (1000 fois Hiroshima) qui fit regretter à Kroutschev lui-même (c’est dire !) d’en avoir autorisé le développement malgré l’opposition de Sakharov notamment, ainsi que le relate Georges Charpak (Feu follet et champignon nucléaire, éditions Odile Jacob).

Non, aujourd’hui on parle de guerre cybernétique. Ainsi, le ver Stuxnet a-t-il mis en émoi les spécialistes de la sécurité informatique du monde entier, en réussissant à pénétrer le programme nucléaire iranien. D’autant que sa sophistication ne pourrait pas être le fait d’un geek anarchiste ou plus prosaïquement vénal, ou bien d’une bande organisée de criminels mafieux mais d’une ou plusieurs équipes d’experts soutenues par des états.

Vite, un antibiotique pour mon Cloud !
Avec la multiplication et l’ampleur sans précédent de telles attaques comme l’actualité récente nous le montre (notre ministère des finances à Bercy, des agences gouvernementales en Corée du Sud, le Comité International Olympique, l’ONU et les Etats-Unis, etc), une question alors me hante. Et le cloud la-dedans : quelles menaces intrinsèques fait-il porter sur la mémoire des individus, des entreprises, des états et par extension, à l’Humanité toute entière ?

Crédit Igor Zenin

Le train est en marche

Il ne se passe pas un jour, que dis-je, une heure, sans qu’un papier d’opinion plus ou moins argumenté ne fasse l’apologie de « la convergence des machines vers La Machine » comme l’anticipait le journaliste Pierre Berger (L’informatique libère l’humain, éditions L’Harmattant).

Or les initiatives étatiques telles que l’OpenData, la « ruée » mercantile des entreprises vers le cloud et la banalisation des réseaux sociaux (la partie visible du cloud grand public) met l’ensemble de la mémoire numérique sous tension. Sans qu’aucune réflexion ni politique, ni économique, ni technologique ne soit menée. « Si l’on veut un système sûr, il faut commencer par la sécurité! Tout le monde utilise l’Internet mais personne ne sait comme c’est dangereux! » rappelle un expert en la matière, le célébrissime Mafiaboy.

Pourtant tout est dit dans ces quelques lignes du dernier livre blanc en date « Défense et sécurité nationale » (juin 2008, éditions Odile Jacob) : « Les moyens d’information et de communication sont devenus les systèmes nerveux de nos sociétés, sans lesquels elles ne peuvent plus fonctionner.[..] La menace est multiforme : blocage malveillant, destruction matérielle (par exemple, de satellites ou d’infrastructures de réseau névralgiques), neutralisation informatique, vol ou altération de données, voire prise de contrôle d’un dispositif à des fins hostiles.
Dans les quinze ans à venir, la multiplication des tentatives d’attaques menées par des acteurs étatiques ou non, pirates informatiques, activistes ou organisations criminelles, est une certitude. Certaines d’entre elles pourront être de grande ampleur.
»

Cachez ce gros cloud noir que je ne saurais voir…
Dans ce contexte, quelle place donner au consortium « Cloud Computing » lancé sous le sceau de la « souveraineté nationale » par le premier ministre français ? Faut-il y voir les prémices d’une démarche structurelle « combinant protection intrinsèque des systèmes, surveillance permanente, réaction rapide et action offensive, [qui induit] une forte impulsion gouvernementale et un changement des mentalités » ?

A plus d’un égard, on ne peut que se réjouir (à priori) de voir la France réunir ses champions de dimension européenne si ce n’est mondiale – notamment Orange, Thales, Dassault (les membres fondateurs de ce consortium) ou encore EADS Cassidian ? – pour développer et commercialiser des moyens pro-actifs que l’Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information) ne renierait pas.

Evidemment certains ne manqueront pas de voir ici un potentiel « big brother » liberticide. Sans toute fois lever une telle objection face à une offre privée! Mais n’est-ce pas là un risque moindre au regard de la puissance destructrice de la perte à grande échelle de données ? Sans verser dans le trans-humanisme qui vise à faire du Web « le troisième hémisphère de notre cerveau » selon le bon mot que l’on prête au Pdg de Google, que serait notre humanité soudain privée de e-mémoire?

« Songez que toutes les merveilles, objets de vos études, expriment l’oeuvre de plusieurs générations.[..] Tout cela dans vos mains devient un héritage. Nous sommes ainsi des mortels immortels parce que nous créons ensemble des oeuvres qui nous survivent. » disait Albert Einstein lors d’une allocution à des enfants. Par sa puissance centralisatrice, un cloud non sécurisé ne nous menace-t-il pas d’un « hiver nucléaire » comme à la fin de la guerre froide, lorsque le monde comptait dans ses stocks l’équivalent de plus de 2 tonnes d’explosif par habitant de la planète ?

« La chimie du carbone étend ses possibilités grâce à la chimie du silicium. Informatique et biologie se rejoignent. Pour l’âme digitale, on ne voit pas comment elle pourrait régresser par elle-même. » notait Pierre Berger. Par elle-même, non en effet. Mais il suffira, un jour, d’une faille…

  1. 25 août 2011 à 08:23

    Histoire de compléter mon propos :
    – Chinese state TV shows military cyber hacking clip | Reuters http://reut.rs/plDrvy via @reuters
    – Contre la cyberguerre : organiser la cyberdéfense | Chroniques France Info http://www.france-info.com/chroniques-pirates-du-nouveau-monde-2011-08-24-contre-la-cyberguerre-organiser-la-cyberdefense-552029-81-541.html

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